Faciliter et accompagner la transition des mobilités

La galerie de sécurité du tunnel de la Croix Rousse (Lyon), qui sert également de tube pour les modes doux et les transports en commun (©CETU)





Les tunnels et les espaces souterrains sont des espaces clés permettant de favoriser la transition vers des modes de transport plus respectueux de l’environnement.
En zone urbaine, les tunnels peuvent constituer une solution de transport optimisée, conduisant à des réseaux interconnectés et facilitant le report modal vers des modes moins « polluants » (création de hubs multimodaux souterrains). Les réseaux de transport guidés urbains, en sont une illustration : les dizaines de kilomètres de linéaire de tunnels renforcent l’efficacité des déplacements grâce à une diminution significative des temps de parcours, contribuant ainsi à favoriser le report modal (cas du métro parisien et du futur Grand Paris Express).

Les tunnels urbains peuvent contribuer à la fois à la décarbonation des déplacements et à la transition vers des mobilités plus durables en favorisant les modes actifs (vélo, marche, trottinette…) ou bien les modes alternatifs (transports en commun, covoiturage, engin de déplacement personnel motorisé…).

En zone rurale et notamment montagneuse, les tunnels peuvent permettre de réduire la longueur et la pente d’un itinéraire, favorisant un report vers le transport ferroviaire. On estime que la nouvelle liaison Euralpin Lyon-Turin et son tunnel permettra de rediriger 50% des marchandises transitant par les Alpes vers le transport ferroviaire, contre seulement 10% actuellement. La diminution des pentes du parcours devra également permettra d’économiser 40 % de l’énergie.

L’évolution du parc automobile fait également partie de la transition dans les mobilités, avec une part croissante de véhicules utilisant des nouveaux modes de propulsion (électricité, gaz, hydrogène…). Cette évolution engendre de nouveaux risques dans les tunnels routiers qu’il convient de comprendre et de prendre en compte dans les mesures d’exploitation et de sécurité. Ainsi, lorsqu’on parle de transition dans les mobilités, il s’agit à la fois de transition écologique et énergétique.



Intégrer les mobilités douces dans les tunnels existants

Les grandes métropoles, cherchent actuellement à réduire le trafic routier et donc à favoriser d’autres modes de transport, et notamment les modes de déplacement « actifs » que sont la marche et le vélo.

Par ailleurs, l’État a incité les régions à développer les véloroutes et voies vertes dans le cadre de schémas régionaux véloroutes et voies vertes. Elles sont souvent créées sur d’anciennes lignes de chemin de fer comportant des tunnels.

En parallèle, se développe, et non sans poser des difficultés de cohabitation, l‘usage d’engins de déplacements personnels (EDP) : trottinettes, rollers, skates, qui existent aussi en version motorisée ; on parle alors d’EDPM ou de micromobilité, avec sa déclinaison électrique.

Aménagement d'une piste cyclable en tunnel à Nice (© CETU)





Une absence de guide ou recommandation

Dès 2015, le Décret n° 2015-808 du 2 juillet, relatif au plan d’actions pour les mobilités actives et au stationnement avait pour objectif une adaptation des règles de circulation routière en vue de sécuriser et de favoriser le cheminement des piétons et des cyclistes, mais il n’évoque à aucun moment la problématique des tunnels.

En septembre 2022, la Première Ministre a lancé le plan « Vélo et marche 2023-2027 » afin de redoubler d’efforts et d’inscrire définitivement le vélo dans le quotidien de tous les Français. Le premier comité interministériel relatif à ce plan s’est tenu le 5 mai 2023.

Le contexte ci-dessus est relativement récent et les tunnels routiers existants, dans leur immense majorité, ont été conçus en excluant les trafics piétons et cyclistes. À ce jour, il n’existe pas de guide ou de recommandation sur ce sujet.

Le CETU est néanmoins régulièrement interrogé sur les modalités d’aménagement des tunnels routiers, avec une accélération de ces demandes suite à la crise sanitaire de 2020 et la création de
« Coronapistes ». Ainsi, l’enjeu est d’accompagner la démarche générale de développement de l’ensemble des mobilités douces, en rendant possible leur passage en sécurité dans les tunnels routiers, urbains comme interurbains, et sur voies vertes.

Actions de recherche et publications CETU

En l’absence de doctrine établie pour aider à la bonne prise en compte des modes actifs dans les tunnels routiers, l’organisation d’un atelier du GTFE sur ce sujet, en octobre 2023, a permis de sensibiliser les exploitants au cadre réglementaire et aux principales dispositions qui s’appliquent aujourd’hui sur le réseau de voiries à l’air libre. Il a également permis de constater l’évolution des pratiques et des trafics, tout comme celle de l’accidentologie.

Les Actes du GTFE sur cette thématique sont disponibles ici .

Le CETU a lancé en 2024 un axe de recherche spécifique à la transition des mobilités. Dans un premier temps, il s’agira de dresser un état des lieux des mobilités douces en tunnel routier, de recenser les aménagements réalisés et d’identifier les difficultés rencontrées ainsi que les enjeux en termes de réglementation et de sécurité. Un document d’information qui sera publié prochainement, présentera des exemples d’aménagements vélos récents en tunnels routiers (en agglomération et rase campagne).

Une doctrine technique sera ensuite élaborée. Elle précisera les dispositions d’exploitation et de sécurité nécessaires pour l’intégration des mobilités douces en tunnel existant, avec une focalisation sur des aspects tels que la géométrie, la signalisation, l’éclairage et la ventilation. Une réflexion sera également menée sur l’introduction des nouvelles mobilités douces au niveau du plan d’intervention et de secours. En ce qui concerne les tunnels localisés sur les voies vertes, une doctrine technique spécifique sera élaborée.


Identifier les risques et enjeux liés aux nouveaux modes de propulsion

Bus fonctionnant à l'hydrogène





Les nouvelles énergies de propulsion se sont développées afin de lutter contre le réchauffement climatique et la pollution de l’air. Des contraintes réglementaires s’appliquent déjà aux exploitants des transports en commun afin qu’à terme, seuls les véhicules fonctionnant avec ces nouvelles énergies soient utilisés.

Des phénomènes spécifiques liés à ces nouvelles énergies peuvent toutefois présenter un danger particulier en milieu souterrain, pour les usagers et pour les services de secours. L’intervention de ces derniers peut être parfois rendue plus difficile. Tous les types d’ouvrages souterrains sont potentiellement concernés par ces phénomènes : tunnels routiers et ferroviaires, ouvrages de desserte urbaine, voire parcs de stationnement et ouvrages spécifiques (stockage des déchets, etc.).

Aucune réglementation spécifique à la circulation des véhicules ou trains fonctionnant avec ces nouvelles énergies n’existe actuellement en milieu souterrain. Seule une ancienne recommandation BEA-TT/DSCR prévoit d’exclure le passage des autobus roulant au GNV dans les tunnels interdits au transit des transports de marchandises dangereuses. Cette recommandation a été confortée dans les rapports de la CNESOR depuis 2012, faute d’informations nouvelles suffisantes pour lever cette interdiction.

Elle pose cependant des difficultés aux exploitants de transport en commun dans le cadre du passage de leur flotte aux nouvelles énergies. Plus généralement, ces exploitants s’interrogent sur les risques réels associés au transit de ces nouveaux modes de propulsion dans les tunnels. Ainsi, le CETU a engagé des travaux de recherche afin d’améliorer les connaissances dans ce domaine et de mieux répondre aux interrogations de la profession.

Actions de recherche du CETU

Ces dernières années, le CETU a mené plusieurs actions de recherche afin de mieux évaluer l’impact de ces nouvelles énergies sur la sécurité des ouvrages souterrains. Un projet de recherche conjoint avec l’INERIS a notamment permis d’obtenir des premiers résultats en termes d’analyse et de mesure des risques additionnels liés à ces nouvelles énergies.

Parallèlement, un groupe de travail « NERTT » (Nouvelles Energies et Risques Technologiques en Tunnel) a été mis en place en 2020. Il réunit des représentants des différents acteurs confrontés à cette problématique : exploitants d’infrastructures, exploitants de transports en commun et leurs autorités administratives, services de secours. Ce groupe ambitionne de produire un document faisant état du cadre économique, législatif et réglementaire ainsi que des risques et contraintes pour les différents acteurs.

Malgré ces études, des questions demeurent. Les travaux de recherche du CETU vont ainsi se poursuivre avec deux objectifs :

  • d’une part, conforter et améliorer la compréhension des technologies (y compris les systèmes de sécurité), des phénomènes dangereux et des moyens de mitigation techniques externes aux véhicules ;
  • d’autre part, indiquer à la communauté des ouvrages souterrains comment prendre en compte ces nouvelles technologies dans la gestion de la sécurité.

Les études auront d’abord pour cadre les tunnels, tant dans le domaine routier que ferroviaire. Lorsque les connaissances seront suffisamment confortées, elles seront transposées ou adaptées à d’autres types de milieu souterrain.

Publications CETU

Les études déjà réalisées tendent à montrer que les phénomènes dangereux liés aux véhicules électriques à batterie n’appellent pas de réponse spécifique, excepté dans les phases d’intervention des secours et de remise en service après incendie. Ces études ont également permis de mieux cerner l’impact des phénomènes liés au gaz sur les usagers.

Ces travaux ont conduit à la publication d’un document d’information CETU intitulé « Les nouveaux modes de propulsion en tunnel routier : risques et enjeux - état des lieux partagé ».






Articles de congrès
“Integration of new energy carriers in French specific hazard investigations, overview of principal issues” , C. WILLMANN, P. CHARLES (CETU), Tunnel safety and Ventilation Conference, Graz, Autriche, 2024

“The use of Natural Gas Vehicles in underground facilities : Application to the Paris-La-Défense underground network”, B. TRUCHOT (INERIS), C. WILLMANN (CETU), P. PERSONNA (Paris La Défense), Tenth International Symposium on Tunnel Safety and Security, Stavanger, Norvège, 2023


Autres publications élaborées avec une forte contribution du CETU

Au niveau international, le CETU a également été fortement impliqué dans la rédaction d’un rapport technique PIARC sur cette thématique.

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