Contexte et enjeux
Transition écologique et ouvrages souterrains : de quoi parle-t-on-exactement ?
Le Commissariat Général au Développement Durable définit la transition écologique comme un concept visant à mettre en place un nouveau modèle économique et social de manière à répondre aux enjeux écologiques de notre siècle. La notion de transition met l’accent sur l’accélération des changements vers un développement durable à travers des initiatives concrètes et des démarches citoyennes locales.
Par ouvrages souterrains, on entend :
- les tunnels routiers, ferroviaires et de transports guidés,
- les ouvrages techniques : réseaux d’assainissement et d’eau pluviale, infrastructures de recherche et de logistique,
- les espaces souterrains urbains abritant des fonctions diverses comme les gares, centres commerciaux, salles de spectacles, gymnases, piscines…
La contribution des ouvrages souterrains aux objectifs de développement durable
Les Nations Unies ont adopté 17 objectifs de développement durable pour répondre aux défis mondiaux à l’horizon 2030. Ces objectifs englobent des enjeux tels que le climat, la biodiversité, l’énergie, l’eau, mais également la santé et la prospérité économique et socio-culturelle.
Les ouvrages souterrains peuvent contribuer à un certain nombre de ces objectifs :
En adoptant des principes « d’éco-conception » à toutes les étapes de la vie d’un ouvrage, le souterrain peut contribuer à l’économie circulaire. Il s’agit notamment de gérer et valoriser les matériaux excavés, de choisir des matériaux et méthodes de construction plus vertueux et durables, et de rationaliser les équipements, toute en limitant leur consommation énergétique et en prolongeant au maximum leur durée de vie.
En évitant la construction d’infrastructures de surface et en limitant l’artificialisation des sols, les ouvrages souterrains permettent d’assurer la continuité de la trame verte et de préserver la faune et la flore par des mesures appropriés (y compris compensatoires).
Des partenariats se mettent en place au niveau national et international afin de développer une véritable stratégie pour le développement de l’espace souterrain. Des exemples de projets français (tels que « Ville 10D » - ville d’idées ») visent à promouvoir la planification de l’aménagement des villes et des territoires par une meilleure prise en compte des interactions positives entre la surface et le sous-sol.
L’impact « carbone » d’un tunnel routier
Dans un projet d’infrastructure de transport incluant des sections souterraines, les tunnels représentent parfois une part importante du linéaire. Le Grand Paris Express, par exemple, comportera un peu plus de 170 km de sections souterraines contre 30 km de section à l’air libre. Au même titre que d’autres ouvrages d’art, les tunnels sont ainsi potentiellement responsables d’une part significative des émissions de gaz à effet de serre de la construction des projets d’infrastructure (quantités importantes de béton et d’acier). Il est donc primordial d’identifier les principaux postes émetteurs de gaz à effet de serre (GES) afin de mettre en place des mesures de réduction. Cette identification doit être accompagnée d’une analyse sur l’ensemble des phases du cycle de vie de l’ouvrage et plus globalement de l’infrastructure.
Pour un tunnel routier, quels sont les postes les plus impactant ?
En construction en méthode conventionnelle et selon l’indicateur d’impact :
- 10 à 30% des impacts de la construction sont dus aux engins et installations de chantier
- 70 à 90% des impacts proviennent des matériaux (80% à 95% des impacts des matériaux viennent des bétons et des aciers)
Les impacts du transport lié à l’approvisionnement en matériaux et à l’évacuation des déchets sont variables et constituent un point de vigilance selon les distances et les modes de transport.
Comptabilisés sur une centaine d’années, les impacts de l’exploitation sont essentiellement liés à la consommation électrique des équipements et dans une moindre mesure à leur renouvellement et recyclage. Cependant, selon les modes de transport (routier, ferroviaire, transport guidé urbain), les impacts « carbone » varient, car les équipements ne sont pas les mêmes.
Répartition des impacts carbone d’un tunnel routier et comparaison avec l’impact du trafic qu’il supporte
Prenons l’exemple pour un tunnel routier urbain bidirectionnel (2x2 voies) de 2000 mètres de longueur avec un trafic journalier de 40 000 véhicules et un taux moyen d’émission de 126g CO2/km/véhicule.
Sur 100 ans, sans hypothèse sur les évolutions du trafic, du mix électrique, du parc automobile et sans prendre en compte les potentiels sauts technologiques en matière d’équipements :
- l’éclairage et la ventilation représentent environ 3% des impacts CO2e (2/3 pour l’éclairage et 1/3 pour la ventilation) ;
- la construction représente 11% des impacts CO2e et l’usage (i.e. le trafic) 85%.
Synthèse | Commentaires | Emissions | Unité | % |
---|---|---|---|---|
Construction | Méthode conventionnelle (hors transport) | 55 000 | t CO2e | 13 |
Equipements | Eclairage en bidirectionnel | 9 984 | t CO2e.100 ans | 2 |
Equipements | Ventilation (Longitudinale avec extraction massive (LEM)) | 4 880 | t CO2e.100 ans | 1 |
Trafic | Trafic du tunnel | 367 920 | t CO2e.100 ans | 84 |
Total sur 100 ans | 437 784 | t CO2e.100 ans | 100 |
Synthèse des émissions de GES sur 100 ans d’un tunnel routier de 2000 mètres de long, éclairé, ventilé et supportant un trafic journalier de 40 000 véhicules.
Dans le cadre d’une approche plus globale, on notera que si ce tunnel permet d’éviter d’emprunter un itinéraire alternatif 6 fois plus long, les émissions dues au tunnel seront compensées en 3 ans seulement (amortissement de la construction et de l’exploitation du tunnel).
Accompagner la profession du souterrain dans la transition écologique
Le CETU a pour ambition de soutenir la profession du souterrain dans ses initiatives en faveur de la transition écologique, afin de promouvoir des pratiques plus économes en ressources, plus respectueuses de l’environnement et globalement plus « durables ».
Pour impulser ce changement, le CETU a mis en place une mission spécifique « Transition dans les Pratiques et Développement Durable » (TPDD) et a adopté un programme de recherche ambitieux, largement tourné vers la transition écologique dans les ouvrages souterrains, à travers les thématiques suivantes :
- bilan environnemental et écoconception des ouvrages souterrains.
- matériaux excavés et optimisation des ressources minérales.
- sobriété des équipements : optimisation des ressources et des consommations d’énergie.
- transition dans la mobilité : intégration des modes doux dans les tunnels existants et intégration des nouveaux modes de propulsion en milieu souterrain.
- la préservation de l’environnement et le cadre de vie.
Publications CETU
La plaquette "Ouvrages souterrains et transition écologique"
Dossier Pilote des tunnels : fascicule 5 - Environnement
Articles
“What might be our vision of the ecological transition in tunnels and underground spaces for the years to come?”, L. D’Aloia Schwartzentruber, World Tunnel Congress 2023